Moustapha Guirassy sur le port du voile : «Si on écoute bien Ousmane Sonko…»

Moustapha Guirassy a d’abord voulu rappeler le contexte de célébration de l’excellence qui a prévalu et a permis au Premier ministre, Ousmane Sonko, d’aborder cette question de « l’inclusion scolaire » et de « l’inclusion sociale ». C’était aussi, recadre-t-il, « un contexte où il fallait mettre sur la table un sujet important, celui de l’inclusion ». Et de se souvenir que, « d’habitude, la célébration de la journée du concours général était, généralement, constituée d’une seule partie, c’est-à-dire celle de la journée où le chef d’État était présent, ainsi que les membres du gouvernement. Cette fois-ci, l’une des innovations, c’était d’organiser, donc, cette rencontre-là, et le sujet qui était important pour le gouvernement et le chef du gouvernement, c’était la question de l’inclusion, et bien sûr celle de l’excellence ». Et sur la scène, se rappelle le ministre, « nous avons mis le Premier ministre, qui était entouré par les deux lauréats, Mlle Samb et M. Touré, qui avaient été célébrés, donc, et à côté, nous avions deux élèves qui étaient spécifiquement porteurs d’un message, parce que dans le cas justement de l’inclusion, il était important de les mettre en avant. C’était un enfant du Daara qui a même eu à poser une question et c’était, à l’autre bout, un de nos enfants qui est en situation de handicap ».

 Il rappelle que « c’était donc le contexte », également, qu’« à une question posée par cet enfant-là, qui était en situation de handicap, le Premier ministre a répondu, en disant qu’il fallait absolument garantir à l’école une inclusion scolaire et sociale. Il disait même qu’il était important de revoir même nos constructions, les constructions des écoles, et au-delà de la construction des écoles, il parlait de la construction des bâtiments, de façon générale, qui ne prévoyait pas ou qui ne prenait pas suffisamment en compte ses enfants ou ses citoyens en situation de handicap. C’était donc juste la réponse avant l’interrogation qui devait être posée, après, par l’élève du Daara, lequel, à travers sa question, a pris en compte, naturellement, sa spécificité, et l’impression ou le sentiment qu’elle a, en tant qu’élève de la Dara, qui avait une exclusion ou que ces enfants-là n’étaient suffisamment pris en compte dans le système.

 À la question adressée au Premier ministre : « que comptez-vous faire pour les enfants des Daras », Ousmane Sonko, souligne Guirassy, « dans la même logique et toujours constant par rapport au principe de l’inclusion sociale et scolaire, est revenu en disant : « nous devons œuvrer pour que tous les enfants, les citoyens, se retrouvent dans l’école. L’école, elle est là pour tous nos enfants. Nous devons, pour les enfants en situation de handicap, les accompagner ». Et, poursuit le ministre, puisqu’il répondait, donc, à l’enfant du Daara, il dit : « il faut absolument que vous soyez intégré dans le système ». Et d’ailleurs, remarque-t-il, « lorsqu’un enfant, parce qu’il porte le voile, est interdit d’accès dans une école, je trouve que ce n’est pas bien, il faut que ces pratiques-là cessent ». Moustapha Guirassy précise qu’« il n’a jamais été question, dans le discours, de stigmatiser ni la communauté islamique ni la communauté catholique chrétienne ». Il dit avoir été personnellement très surpris de « voir les journaux faire un lien extrêmement dangereux » et, poursuit-il, « franchement en pensant s’attaquer au chef du gouvernement, ils sont, sans le savoir, ou en le faisant sciemment en tout état de cause, en train, en fait, de saper les bases d’une nation ». Aussi d’indiquer : « et c’est là, le message le plus puissant du chef du gouvernement en rappelant la position constante et ferme de l’État. Nous parlons d’un État, un État cimenté, une nation qui a un ciment réalisé par le truchement d’une Constitution qui met en avant une laïcité, un État laïque, une République, une nation laïque, qui fait le bonheur du Sénégal, qui fait la singularité du Sénégal, qui fait son signe distinctif, qui fait qu’aujourd’hui nous sommes enviés partout, c’est notre chère Constitution ».

 Le Premier ministre, à en croire Guirassy, « a rappelé ce principe de laïcité en disant que dans une neutralité arbitrale, l’État, comme la métaphore donc dans un terrain de football, ne peut pas jouer en faveur d’une équipe ou d’une autre, l’État doit être au centre, simplement s’assurer que les règles du jeu sont respectées par les différents membres ou les différents acteurs sur le terrain. C’est ce qu’il a rappelé ». Et, pour le ministre de l’Éducation, « rappeler l’importance de la Constitution, rappelez aussi l’importance du citoyen en réalité, signifierait qu’en réalité, Ousmane Sonko est en train de protéger, non seulement l’enfant du Daara, mais l’enfant qui porte la croix. Si on l’écoute très bien, le chef du gouvernement est en train de dire que même dans une école dite musulmane, à partir du moment où le projet pédagogique est républicain, répond le ministre de l’Éducation nationale, on ne peut pas refuser l’accès à un enfant qui porterait la croix ou des perles sacrées. C’est ça le message ». Mais, pense-t-il, « naturellement l’exemple devait porter sur la Dara, parce que c’est un enfant de la Dara qui a posé la question. Mais un enfant portant la Croix serait là, aurait posé la même question, dans la même logique, dans la même constance d’inclusion sociale et scolaire, naturellement, je suis certain que la réponse serait oui, aucune école n’a le droit de priver à un enfant sénégalais portant la Croix ou des Perles ou autres signes relevant de sa croyance, aucune école n’a le droit d’exclure cet enfant-là. Voilà le message et c’est triste ».

 Guirassy trouve « dommage » qu’« on entende, après, certains parler de l’église. Non, ce n’est pas l’église qui s’est prononcée ici, ce sont des politiciens qui se prononcent ici, ce sont des citoyens qui ont, peut-être, soif de visibilité ou, peut-être, dans une certaine logique simplement, mais vraiment, c’est une gratuité extraordinaire de la part de certains qui sont en train dangereusement d’évoquer et de provoquer et de porter des discours qui ne sont pas bons pour nos sociétés ».

 Il rappelle que « deux, trois jours avant, c’est le chef du gouvernement qui m’a envoyé rencontrer l’archevêque, ceci est quand même important, c’est le Premier ministre Ousmane Sonko qui a demandé à son ministre de l’Éducation nationale, dans le cadre de la rencontre avec les communautés religieuses, de se rendre chez l’archevêque, pour deux messages : « un premier message de félicitation à toute l’Église et aux écoles catholiques pour la performance scolaire réalisée depuis » ; « le deuxième message, qui était, peut-être, le plus fort, consistait à dire à l’archevêque, au nom du Premier ministre, un grand merci au nom de toute la nation sénégalaise parce que les écoles catholiques ont permis de consolider, de façonner nos valeurs de tolérance et de respect. Quand le musulman est le premier à envoyer son enfant dans l’école catholique en disant que c’est la bonne école, sachant bien que c’est une école catholique, ce n’est pas gratuit. Nous avons tous envoyé nos enfants donc vers ces écoles et quand l’enfant grandit, non seulement on lui assure une performance scolaire, mais il y a le comportement, les valeurs très importantes qui sont véhiculées par ces écoles. Alors, ce que la nation gagne, c’est que l’enfant musulman qui grandit et sous ses yeux, il voit le portrait de Jésus-Christ, de la Sainte Marie, mais forcément il grandit avec l’esprit de respect, et la société sénégalaise, c’est une belle société, on n’a pas ces problèmes ». Pour Guirassy, « ce discours-là que certains veulent entretenir n’a pas lieu d’être parce que ce n’est pas le reflet de notre société. Les filles voilées n’ont pas de problème, les enfants qui portent des croix ou des Perles n’ont pas de problème. C’est la réalité. Et cette réalité-là doit se réfléchir au sein des établissements, au sein des écoles ».

 Le ministre de l’Éducation nationale de renchérir que, d’ailleurs, « le Premier ministre nous a instruit de soumettre tous les règlements intérieurs des différentes écoles à l’épreuve du règlement supérieur qu’est la Constitution ». Aussi de rappeler : « Pour avoir l’autorisation d’exercer, parmi les pièces à fournir, il y a le règlement intérieur, lequel, dans l’ordonnancement juridique, ne peut pas être au-dessus de la Constitution. Dans l’ordonnancement juridique, il y a la Constitution qui lie tout et, après, il y a les règlements intérieurs, lesquels ne peuvent pas avoir des dispositions qui vont dans le sens contraire de la Constitution ». Et de se demander : « Est-ce que c’est méchant de dire ça ? Est-ce que c’est grave de dire ça ? Est-ce que ce n’est pas de garantir à l’enfant chrétien, à l’enfant animiste, à l’enfant musulman, un avenir prospère ?

 Pas plus tard qu’hier, se rappelle Moustapha Guirassy, « le Premier ministre me disait : Je ne m’adressais même pas, en réalité, à la gent catholique, je m’adressais même, parfois, à des musulmans qui, dans une école musulmane, pourraient être tentés d’exclure un enfant musulman ou une fille musulmane qui ne porterait pas le voile ». Et même pour ça, dit-il, « l’école n’aurait pas le droit de le faire ». Il trouve, donc, franchement que « c’est un message républicain qui était lancé, un message qui protégeait nos enfants, un message qui protégeait nos diversités, qui magnifiait l’Église, qui magnifiait les religions, un message qui disait que l’éducation religieuse était importante, c’est pour ça qu’il donnait la parole au Daara, c’est pour ça que, en tant que ministre, j’étais envoyé vers l’archevêque ».

 « Tout ce qui se dit n’engage que ceux qui portent ce genre de discours et on les connaît, on les reconnaît et, franchement, je dirais simplement comme Jésus le disait : « Oh, mon Seigneur, pardonne-les, c’est parce qu’ils ne savent ».